Le ponton de la Bordelaise, sur la commune de Frontignan, représente un site de plongée emblématique de notre territoire. Véritable vitrine sur la lagune de Thau, il accueille de très nombreux plongeurs à la recherche d’un paysage sous-marin atypique et d’une biodiversité exceptionnelle, telle que la Grande nacre, l’Hippocampe moucheté, les herbiers et de nombreuses limaces de mer. Ce site est inclus dans le périmètre Natura 2000 de la lagune de Thau, désormais considérée Aire Marine Protégée. Un projet expérimental de restauration du site est désormais engagé pour sauvegarder la richesse environnementale exceptionnelle qui est présente.
Le contexte
Situé à l’embouchure du canal du Rhône à Sète, le ponton de la Bordelaise est menacé par des dégradations historiques (ancienne décharge) et récurrentes (macro déchets et échouages de navires). Aujourd’hui, ce sont plus d’une trentaine d’épaves, de plus ou moins grande dimension, qui ont été recensées sur ce site, ainsi que de très nombreux macro-déchets.
Le Syndicat mixte du bassin de Thau et Sète agglopôle méditerranée, appuyés par le bureau d’études Biotope, ont souhaité engager un projet de restauration et de dépollution du site du ponton de la Bordelaise. Ce projet est réalisé avec l’appui financier de l’Office Français de la Biodiversité (OFB), dans le cadre du Life MarHa (LIFE 16 IPE FR001) pour la restauration et le maintien du bon état de conservation des habitats naturels marins et lagunaires en France.
Un projet de restauration écologique pilote en France
Le projet visant le nettoyage sous-marin et la restauration du site emblématique de la Bordelaise est une première en matière de gestion intégrée des épaves en Aire marine protégée. Il repose sur la réalisation d’une méthodologie d’aide à la décision sous la forme d’une grille d’analyse, qui permettra d’identifier les épaves à extraire en fonction de la sensibilité environnementale du site, et à ce titre il a une vocation expérimentale.
Un document pionnier qui pourrait être traduit en guide national pour la gestion intégrée des bateaux de plaisance hors d’usage en aires marines protégées.
La force du projet est de bénéficier d'un encadrement écologique renforcé (suivi écologique fin avant, pendant et post travaux) ainsi d'être le fruit d'une construction collective avec de nombreux acteurs impliqués.
La conception et l’application d’une grille d’évaluation de plus/moins-value environnementale au retrait de ces bateaux de plaisance hors d’usage (BPHU) permettront de veiller à analyser au cas par cas chaque épave avant intervention, afin de redonner au site de la Bordelaise sa naturalité.
Il est prévu que 15 épaves seront retirées du site en 2024. Elles sont principalement situées en bord de berge et le long du ponton de la Bordelaise.
Déroulement d’un chantier exemplaire
Le chantier a démarré le vendredi 9 février pour une durée de 10 jours, fluctuant au gré des aléas du chantier et des conditions météorologiques.
La période du chantier a été spécifiquement choisie pour limiter la perturbation de la biodiversité sous-marine ou des métiers de la pêche et de la conchyliculture.
Les épaves ont été sorties de l’eau par extraction à l’aide d’une grue, puis posées au sol afin de permettre à l’eau de s’écouler et aux écologues de s’assurer de l’absence de tout animal dans l’épave (hippocampes notamment) avant évacuation des épaves par voie terrestre. Les épaves seront démantelées et traitées selon les normes et réglementations en vigueur.
Toutes les précautions environnementales ont été prises par l’entreprise de travaux maritimes (Ulysse 34) au moment des extractions tels que des barrages anti-pollution ou des filets anti matières en suspension afin d’éviter tout effet néfaste sur la qualité de l’eau.
Un projet pilote et concerté issu d’une dynamique citoyenne
Alertés par les plongeurs fréquentant le site de la Bordelaise sur l’accélération de la dégradation du site (appuyés par l’association Rescue Ocean), les services de l’Etat avaient enclenché une première réflexion de projet de nettoyage d’envergure avec les partenaires en 2020. Freiné par le contexte Covid et l’ampleur des enjeux à traiter, le projet a muri et profité d’un appui de l’OFB pour sa concrétisation.
Ce projet innovant a nécessité 2 années de construction collective avec l’appui de nombreux partenaires institutionnels et techniques auprès du SMBT et de Sète agglopôle : la Préfecture maritime de la Méditerranée, la Direction Départementale des Territoire et de la Mer (DDTM), la Direction régionale de l'Environnement, de l'Aménagement et du Logement Région Occitanie (DREAL), la Ville de Frontignan, Voies Navigables de France, mais également en concertation avec les clubs de plongée locaux très actifs et attachés à ce site. Les acteurs de la pêche et de la conchyliculture ont également été associés au projet.
Après les travaux d’extraction d’une partie des BPHU, les plongeurs du site de la Bordelaise, attachés à contribuer aux efforts de restauration du site prévoient de mobiliser des plongeurs bénévoles pour poursuivre le nettoyage des macro-déchets sous-marins et terrestres et participer aux suivis écologiques de restauration du milieu et des espèces. Ces initiatives seront accompagnées par le Syndicat mixte du bassin de Thau et ses différents programmes en faveur de la connaissance et la préservation de la lagune de Thau (gestionnaire du site Natura 2000 et porteur du Réseau d’Observation Lagunaire (ROL).
Site expérimental dans la gestion des BPHU, suivi écologique renforcé et mobilisation citoyenne telles sont les clés de ce projet qui fera date dans la gestion du site Natura 2000 de la lagune de Thau.
Coût de l’opération
Le coût des travaux est porté financièrement par le service Déchets (Brigade bleue) et le service Espaces naturels et agricoles de Sète agglopôle méditerranée. L'émergence et l'animation du projet a été co-piloté par le Syndicat mixte du bassin de Thau dans sa compétence de gestionnaire du site Natura 2000.
Le coût total s’élève à 58 300 € HT (69 960 € TTC) financé à 80 % par l’OFB (Office Français de la Biodiversité) et une participation financière de l’État par l'intermédiaire du FIM (Fonds d'Intervention Maritime) à hauteur de 8 000 €.
Suite du projet
La réussite de ce projet pilote et les résultats des suivis écologiques sur la lagune après le nettoyage permettront d’évaluer l’intérêt de la poursuite des opérations de dépollution sur le site de la Bordelaise et plus généralement d’établir une nouvelle manière de traiter la gestion des BPHU sur des secteurs sensibles tels que la lagune de Thau.
Une trajectoire de restauration qui se poursuit et s’enrichit sur la lagune de Thau
Depuis environ quinze ans, les efforts déployés pour réhabiliter la lagune de Thau ont donné lieu à des résultats qui peuvent être qualifiés de remarquables. Ces succès sont le fruit d'une politique volontariste visant à réduire les sources de pollution et à accompagner les projets de conservation des habitats naturels de la lagune. Grâce à une approche globale et intégrée, la restauration écologique de la lagune de Thau a emprunté une trajectoire inédite, marquant un tournant décisif dans la préservation des milieux aquatiques.
Les scientifiques de l'Ifremer, dans le cadre du projet Retroscope, ont étudié plusieurs sites en France pour évaluer leur résilience. La lagune de Thau se distingue parmi ces sites, en affichant des améliorations significatives tant sur les paramètres physico-chimiques que sur les aspects biologiques et de biodiversité. Ces progrès témoignent de l'avancement considérable réalisé en matière de restauration écologique et de préservation de la biodiversité.
Les rapports scientifiques issus de ces travaux de recherche soulignent le caractère rapide et souvent spontané de la restauration écologique de la lagune de Thau. Ces résultats positifs sont à lier aux politiques publiques mises en œuvre, notamment à travers les Contrats de milieu coordonnés par le Syndicat mixte du bassin de Thau. Ces initiatives ont permis de fédérer les acteurs locaux autour d'objectifs communs, favorisant ainsi une gestion durable et respectueuse de l'environnement.
Le Life MarHa, un programme ambitieux de préservation et restauration des habitats marins en France
Lancé en 2018, ce projet Life intégré d’une durée de 8 ans a pour ambition de répondre aux mauvais état de conservation des habitats marins en France. Piloté par l’OFB, il implique 14 partenaires directs sur toutes les facades maritimes françaises et s’adresse à plus de 160 sites Natura 2000 marins et littoraux. Les actions accompagnées ou soutenues sont variées : état de conservation, gouvernance, gestion des usages, formation des gestionnaires, sensibilisation de tous les publics. Le site Natura 2000 lagune de Thau a été soutenu à deux occasions par ce programme : pour la mise en place d’un balisage de plage écologique à Mèze et pour la restauration du site de la Bordelaise. Des projets accompagnés de prés par le Syndicat mixte du bassin de Thau.
Le saviez-vous ?
Natura 2000 est le réseau des sites naturels les plus remarquables de l’Union Européenne, identifiés pour la rareté ou la fragilité des espèces qu’ils rassemblent et leurs habitats. Entre mer et lagunes, vignobles, garrigue, bois et plaines agricoles, le bassin de Thau est un incroyable réservoir de biodiversité. Le SMBT assure le suivi et l’animation de deux de ces sites, celui de l’étang de Thau et celui de la Plaine de Villeveyrac-Montagnac. Désigné par le Préfet, un comité de pilotage (COPIL) définit pour chaque site des objectifs de conservation et des mesures de gestion qui sont ensuite mis en œuvre sous forme de chartes et de contrats co-financés par la Région, l’Etat et l’Union européenne.
Le site Natura 2000 de Thau a rejoint en 2023 le réseau des « Aires Marines Protégées » françaises. D’une superficie d’environ 7 500 hectares et d’une profondeur moyenne de 5 mètres, c’est la plus importante lagune d’Occitanie. Elle abrite une biodiversité exceptionnelle et accueille de nombreuses activités : pêche, conchyliculture, thermalisme, nautisme… Le Syndicat mixte du bassin de Thau, en tant que gestionnaire du site Natura 2000, est gestionnaire de l’Aire Marine Protégée.
En bref, les Aires Marines Protégées (AMP) sont des espaces qui préservent l’étonnante vie marine, garantissent la subsistance de la pêche et des cultures marines, participent à l’économie locale et permettent à toutes et à tous de découvrir une biodiversité préservée. Une exposition participative itinérante a d’ailleurs été lancée afin de valoriser ce espace remarquable. Cliquez ici pour en savoir plus !
En vidéo
La visite de chantier a été relayée par la presse écrite, la radio et audio-visuelle. Ci-dessous quelques reportages vidéos :