Le phénomène d’inversac sur la source sous-marine de la vise dans la lagune de Thau se termine suite aux dernières pluies, celles du week-end du 13 mars 2022.
Les années 2020, 2021 et début 2022 auront été particulièrement sèches avec un fort déficit de pluie (déficit de 270 mm de cumul sur l’année hydrologique 2021) et un manque de recharge des eaux souterraines. Le 28 novembre 2020 lors d’une tempête marine et d’une surcote de 35 cm de la lagune, la source d’eau douce de la Vise au fond de la lagune de Thau, débitant normalement 60 l/s, s’est inversée avec des intrusions d’eau lagunaires dans la nappe d’eau douce.
Depuis le lundi 14 mars et après plus d’une année, la situation est enfin rétablie. Au moment de l’inversac en novembre 2020, des inondations sur Balaruc-les-Bains avaient eu lieu avec une remontée brutale et importante de la nappe. L’inversac entraine une intrusion d’eau salée qui impacte (en sels, matière organique, baisse de température..) le réservoir d’eau douce souterrain mais aussi potentiellement le réservoir thermal.
Un comité de suivi de crise piloté par la préfecture de l’Hérault et opéré par le BRGM avait été monté en décembre 2020 en relation avec le SMBT(2), Sète agglopôle Méditerranée et la ville de Balaruc-les Bains et suivait l’évolution du phénomène de près en se basant sur les suivis des appareils métrologiques posés par le BRGM sur la source ainsi que le réseau de suivi hydrogéologique du SMBT.
Le phénomène aura duré près de 16 mois an et s’est terminé lundi 14 mars vers 9h suite aux dernières pluies apportant des cumuls de 40 à 50 mm sur le littoral et 100 à 150 mm sur le causse d’Aumelas qui ont rechargé suffisamment l’aquifère avec une remontée des niveaux piézométriques.
Si la source coule de nouveau normalement, en revanche, les eaux salées introduites et dispersées dans le réservoir souterrain (environ 6 millions de m3 et 157 000 tonnes de sels selon le dernier bilan datant de début décembre 2021) vont mettre peut-être plusieurs années à ressortir. Ainsi, tout le suivi scientifique et technique de la suite du phénomène, assuré par le BRGM(1) et le SMBT(2), est essentiel pour mieux comprendre le fonctionnement des écoulements souterrains et le retour à la normale de la qualité des eaux du réservoir souterrain.
Le consortium de scientifiques avançant sur le projet (DEM’eaux Thau) a amélioré les connaissances et devrait apporter des propositions d’actions pour maîtriser les risques liés à ce phénomène. Rappelons que 7 inversacs ont eu lieu entre 1967 et aujourd’hui. Ce phénomène peut avoir des occurrences d’apparition plus importantes dans le futur à cause de l’augmentation du niveau moyen de la mer, de la baisse des précipitations, de la recharge de l’aquifère et de l’augmentation des prélèvements.
La Commission Locale de l’Eau (CLE) du SAGE de Thau-Ingril présidée par Michel Garcia (Vice-président de Sète Agglopôle Méditerranée et conseiller municipal à Villeveyrac) s’intéresse particulièrement à ces études techniques afin de pouvoir poser une stratégie territoriale de maîtrise de ces risques pour les différents usagers de l’eau sur cet aquifère, que sont notamment les conchyliculteurs, pêcheurs et aussi bien sûr la station thermale de Balaruc-les-Bains.
La CLE suit attentivement l’inversac depuis sa survenue. Ce sujet a été à l’ordre du jour de plusieurs réunions depuis un an.
Pour Vincent Sabatier, vice-président de la CLE, conseiller communautaire à Sète Agglopôle Méditerranée et adjoint au maire de Sète), « Cet épisode nous rappelle la fragilité de nos ressources en eau. Notre territoire dépend à 80 % de l’extérieur pour son alimentation, ce qui nous impose d’être très vigilants sur leur préservation. Nous devons, aussi mieux connaître nos besoins et nos ressources. C’est tout l’enjeu de l’étude qui sera prochainement lancée par le SMBT qui alimentera nos échanges dans le groupe de travail dédié à la gestion quantitative au sein de la CLE ».
DEM’eaux Thau, quesaco ?
Coordonné par le BRGM, le programme Dém’eaux est mené en partenariat avec d’autres unités de recherche : UMR Géosciences Montpellier, UMR Hydrosciences et une entreprise spécialisée en informatique (Synapse), ainsi que les gestionnaires de la ressource en eau du territoire, dont le Syndicat mixte du bassin de Thau. Inscrit au Contrat de plan Etat-Région, d’un montant de 5,2 M d’€, ce programme vise à mieux comprendre le fonctionnement de l’aquifère. Son financement est assuré par l’Etat (12 %), la Région Occitanie / Pyrénées-Méditerranée (26 %), l’Agence de l’eau Rhône-Méditerranée-Corse (17%), le FEDER (11 %), Montpellier Méditerranée Métropole (4%), la commune de Balaruc-les-Bains, le Syndicat Mixte du Bassin de Thau, les unités de recherche et entreprise partenaires.
Les prochaines échéances du projet : le rendu des rapports techniques en 2022 et la livraison d’un outil de gestion. A partir de données de suivi piézométrique, cet outil sera utile pour mieux évaluer la situation et les risques de déclenchement du phénomène et aidera les gestionnaires et les pouvoirs publics à établir une bonne gestion de l’eau en fonction de sa disponibilité.
Plus d’informations sur Dem’eaux Thau…
(1) BRGM (Bureau de Recherche de Géologie Minière, établissement scientifique et technique public
(2) SMBT : Syndicat mixte du bassin de Thau
Photo : La source sous-marine de la Vise jaillit à 28 mètres de profondeur dans la lagune de Thau (crédit photo : BRGM)